L’idée d’aller voir un club relativement gros et un second évoluant dans les lower leagues me vint assez tôt dans la préparation de ce football trip. J’écumais les calendriers des quatre ligues professionnelles quand, voyant que les matchs étaient tous ou presque programmés en même temps, je décidai de jeter un œil du côté des clubs de non-league. De même, je tombais des nues : le même horaire et le même jour revenait à chaque fois. Fataliste, je laissais alors tomber quelques temps, balayant de la main les Tottenham et Wolverhampton professionnels, seuls clubs jouant à d’autres horaires. Une semaine plus tard, le miracle se fit : un match à Bromley, le lendemain de celui m’amenant à Loftus Road, entre le Cray Wanderers FC et le Merstham FC. Je remerciais alors les programmateurs du calendrier d’avoir mis deux matchs sur le même week-end à Hayes Lane, ce stade étant l’antre du Bromley FC qu’ils partageaient cette saison avec Cray en attente de sa nouvelle enceinte.

 

Le Thameslink annonça l’arrivée imminente en gare de Bromley. Malgré sa proximité avec la capitale Anglaise, cette ville appartenant au Grand Londres paraissait plutôt champêtre lorsque le centre était dépassé. Un petit chemin de terre se frayant un passage entre deux rues goudronnées conduisait au pied du stade. Hayes Lane ne paye pas de mine au premier regard. Bien enclavé entre une forêt, des champs et un centre de fitness, seul un œil aiguisé pourrait apercevoir un stade. Ce n’est qu’arrivé devant le bâtiment que l’on prend conscience que le football nait puis s’éteint en l’espace de 90 minutes ici chaque week-end.

Ce stade aux terraces traditionnelles rassemblait une véritable communauté liée aux Wanderers, les Wands pour les intimes. Celle-ci avait ses habitudes au club-house où, autour d’une pinte, les historiens du club partageaient avec des étrangers leurs souvenirs. Un véritable travail d’orfèvre capturé dans du papier garnissait la table. Entre les programmes portant la marque du match de ce jour, plusieurs livres étaient consacrés à l’équipe, au club, au stade. Ces ouvrages disparurent dès le match commencé pour ne plus réapparaitre, comme s’il fallait être au bon endroit au bon moment pour pouvoir profiter de ces connaissances.

 

 

L’accueil était chaleureux malgré le peu de monde autour du terrain. Une famille d’habitués encourageait l’équipe à grand coup de cornes et de crécelles. Le père ne laissait aucun répit aux oreilles des badauds tandis que les enfants se faisaient entendre d’une façon plus sporadique. Plus précisément, seul l’homme semblait s’intéresser au terrain, tandis que le reste de la famille restait plus en retrait dans les terraces. Malgré l’entrain presque seulement inhérent au père, toute la petite bande était présente : était-ce cela le football familial ? Un lieu de rencontre, de partage, d’éducation et pas uniquement un lieu de football ? Cette vision ayant de quoi attendrir chaque fan de ballon rond contrastait avec la nouvelle tribune située juste en face. Celle-ci était venue remplacer une terrace et était sûrement destinée au Bromley FC plus qu’aux Wanderers qui peinaient déjà à remplir un côté.

La chaleur humaine trouvée dans la banlieue londonienne était, déjà à cette époque, menacée par le mal sanitaire que nous connaissons. Les premiers cas venaient de se faire diagnostiquer et l’on imaginait alors un scénario qui, aujourd’hui, est bel et bien notre quotidien. Qui aurait pu croire qu’une communion telle celle-ci puisse un jour se retourner contre nous et notre passion ? Qui aurait pu croire qu’une scène de liesse puisse être fatale ? Aujourd’hui, c’est le cas. Peut-être qu’un jour nous retrouverons ces scènes de joies et de pleurs partagées publiquement dans les travées d’un stade ou dans sur l’épaule d’une connaissance d’un soir. C’est pour bientôt.

 

 

Photos argentique et texte de Robert.

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Date1 mars 2020
PhotographeRobert
VilleBremley
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